Psy-Cause a été fondée en 1995 par Jean-Paul Bossuat, psychiatre des hôpitaux à Avignon, et Thierry Lavergne, psychiatre des hôpitaux à Aix en Provence, pour promouvoir la théorisation de la pratique de terrain en santé mentale, et contribue aujourd’hui à faire savoir les savoir-faire des psy du monde entier

Un article congolais de Kinshasa dans le N°77 de Psy Cause

Un groupe Psy Cause RD Congo a été mis en place à Abidjan lors du second congrès de la Société Africaine de Santé Mentale, le 7 mars 2017.  Deux années plus tard, ce groupe nous fait parvenir un article intitulé « Profil clinique et sociodémographique de malades militaires hospitalisés au sein de l’unité psychiatrique militaire du Centre Neuro Psycho Pathologique (CNPP) de Kinshasa ». Lequel est signé par dix auteurs et a pour auteur principal le Dr Saïd Mbuku-Nguala, neuropsychiatre au CNPP. Il s’agit du second article de ce pays, publié dans la revue Psy Cause, le premier, du même auteur principal, paraissant en 2014 (N°67, pages 37 à 41), et traitant de la question des malades mentaux errants à Kinshasa. Notre revue est très attentive aux publications en provenance de la République Démocratique du Congo même si elles sont peu nombreuses, ainsi qu’au maintien de contacts avec Psy Cause RD Congo. 

L’écrivain kinois Hervey Ngoma revendique dans l’un de ses textes : à « Kinshasa, nous sommes tous des crânes » (des cerveaux). (La Croix du 2 août 2019). Certainement pour dire qu’il faut plus d’intelligence que la moyenne pour s’en sortir dans cette ville. Les études montrent que les potentialités de ce pays sont immenses. Le positionnement de Psy Cause n’en est donc, dans ce vaste pays, qu’à ses premiers balbutiements.  

L’approche singulière de la RD Congo vis à vis de la langue française illustre la pertinence de la présence de notre revue/association à Kinshasa. Il faut avoir présent à l’esprit que le colonisateur belge n’avait pas le projet de fonder un pays francophone. En 1955, pas plus de 1,47% de la population du Congo Belge n’était francophone. Le Français n’était pratiqué que par les colonisateurs et une élite très restreinte. Or, aujourd’hui, l’OIF reconnaît en RD Congo, dans ce pays de 84 millions d’habitants, 50% de francophones. Ce vaste pays compte 19 millions d’élèves et d’étudiants scolarisés en français, soit 3 millions de plus qu’en France. Dans ce second pays francophone, et dans quelques années, premier pays francophone de la planète, l’expansion de la langue française est un choix post colonial (selon l’historien Isidore Ndaywel, cité par La Croix du 2 août 2019). Cette appropriation populaire de la langue française a d’ailleurs créé des spécificités dans les expressions et le vocabulaire, un peu à la manière du Québec. À Kinshasa, ville de 17 millions d’habitants, première agglomération urbaine francophone, le côtoiement de 200 à 400 langues et dialectes congolais fait de la langue française un outil de communication incontournable.

Le Dr Saïd Mbuku-Nguala, avec la contribution de ses co-auteurs, s’est intéressé à l’exercice de la psychiatrie en milieu militaire congolais, lequel est « en phase de décollage par la création  d’une unité psychiatrique militaire au sein du Centre neuro psycho pathologique de Kinshasa. » L’article adressé à notre revue est une étude statistique qui part du constat que « la prévalence des troubles psychiatriques chez les militaires est de 20-40% plus élevée par rapport à la population générale. » L’étude porte sur 38 malades  hospitalisés au sein de l’unité psychiatrique militaire du CNPP. 

Les conclusions de ce travail indiquent que la « quasi-totalité des patients psychiatriques militaires hospitalisés  au  centre  neuro psychopathologique étaient des malades polytoxicomanes avant leur enrôlement. » Cette polytoxicomanie a pu masquer des pathologies schizophréniques lors de l’enrôlement et/ou être un facteur de déstabilisation psychique. Au total, l’article du Dr Saïd Mbuku-Nguala et collaborateurs, nous fait découvrir l’existence d’une unité de soins du centre psychiatrique de la capitale congolaise, attirant notre attention sur son programme de soins. Cet article illustre également l’une des missions de la revue Psy Cause, surtout dans des zones géographiques francophones peu documentées.  

L’excellent article du journal La Croix sur la Francophonie en République Démocratique du Congo, dont nous nous sommes inspirés, évoque indirectement les difficultés potentielles que pourrait rencontrer sur place une revue comme la nôtre : le livre coûte trop cher ; manquent tous les maillons de la distribution ; l’absence de cartes de crédit. Alors que la demande potentielle des lecteurs est considérable.

C’est d’ailleurs un problème plus général en Afrique qui rend difficile sur ce continent, l’autofinancement d’une revue. C’est pourquoi, en France et dans d’autres pays, nous devrons réfléchir à des ressources complémentaires pour financer un service rendu auprès des acteurs africains francophones de la santé mentale.

                                                                                                              Jean Paul Bossuat

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1 Commentaires

  1. Col psychologue clinicien Dieudonné Ngalamulume est co- auteur de cet article qui aborde la question de santé mentale de son service créee en 2012 par le Gen MEDECIN Militaire et Cmd Corps de santé de FARDC. Son souci était de soigner et accompagner psychologiquement les personnes militaires souffrant de blessures invisibles de guerre et de psychoses chroniques en plus de blessures physiques visibles chez les combattants. Dt psy Dieudonné Ngalamulume qui y est un parmi des responsables en a élaboré une thèse de doctorat en psychologie dans le sens spécifique et dans le même contexte. Salut les co-fondateurs de la Revue psy cause Afrique. MERCI